Black Bazar, d’Alain Mabanckou
« Ce livre est une merde sans nom ! », s’est exclamé mon compagnon après lecture d’une dizaine de pages. En lui demandant pourquoi, il m’a simplement répondu qu’il ne se sentait aucunement concerné par ce récit, qu’il ne comprenait pas forcément où l’auteur voulait en venir et le plus étrange, que les anecdotes énoncées ne provoquaient sur lui aucun émoi, bon ou mauvais d’ailleurs. Mince quand on sait que pour ma part, j’ai lu ce bouquin d’une traite, riant aux éclats, seule dans le métro (passant sûrement pour une folle furieuse). Peut-être qu’il m’a plu par ces situations cocasses que j’ai eu la chance de vivre en live cette fois, allez savoir. Alors livre communautaire ou destiné à un plus large public sensible au dandysme africain ?
Toutes digressions faites, voici le pitch : Dans un marasme coloré, Black Bazar narre l’histoire du « fessologue », appelé comme tel par ses camarades de jeux du fait de son besoin perpétuel d’étudier le fessier de ses sœurs africaines et de les disséquer à la manière d’un chirurgien au bloc opératoire (j’en rajoute un peu là). Toujours « nippé », on préférera ici le terme « sapé », il compte essentiellement dans sa garde robe des pièces griffées Yves saint Laurent ou Weston comme tout sapeur qui se respecte ! Tour à tour, cette histoire nous entraîne dans les méandres du Jip’s, bar afro-cubain, près de la fontaine des Halles, où avec ses comparses, il palabre autour d’une Pelforth sur les conditions humaines et sur les souvenirs de ce cher Congo de Brazza, of course ! Le « fessologue », jeune écrivain en herbe, écrit sous la tutelle de Louis-Philippe le cubain, son histoire d’amour déchue, et y dresse un tableau acerbe de la folie du monde. A travers ce récit folklorique, se cachent des personnages hauts en couleurs comme Roger le Franco-ivoirien, Paul du Grand Congo, en passant par l’Hybride, un type qui joue du tam-tam dans un groupe que personne ne connaît et qui est accessoirement le problème de tous ses maux, sans oublier le martiniquais plus raciste que jamais, excellent (lire absolument le passage sur Mobutu, président du Congo ? Toujours vivant !!! Le bouquin étant contemporain, certains comprendront d’autres pas !).
Un livre drôle et tout aussi pathétique à la fois. Drôle et burlesque quand il fait référence à des codes très africains comme par exemple sur leur façon de penser qu’un noir naissant en France est forcément plus clair qu’un noir venant d’Afrique ou sur leur façon de parader devant leur congénères. Pathétique quand on y découvre parfois un monde superficiel où l’habit est roi et levé en étendard. Mon propre remix, à la fin du bouquin reste douteux, car faut-il comprendre en somme que pour un africain, il ne reste qu’à se marier avec une occidentale (ici blanche in fine) pour s’élever socialement voire spirituellement dans nos sociétés de blancs et ainsi rentrer dans un carcan où la couleur de la peau reste encore une carte maîtresse ?
Maud K.
Mlle Maud K. est journaliste, elle aime l'Afrique qu'elle aimerait couvrir lors de grands reportages, elle aime le champagne au Mama Shelter (Paris 20e) et le pain perdu de Dame tartine (Paris 4e). Maud K est ma partenaire de chaussures puisqu'elle ne l'est plus dans le travail. Elle m'a poussé à lire Anna Karénine et rien que pour ça, merci. Et vous pouvez retrouver ses écrits à elle sur son blog : Demi teinte
Vous pouvez retrouver Alain Mabanckou ici.
La photo du 2e paragraphe est de Baudouin Mouanda.
La dernière est de Jacob Krist
Retrouvez l'épisode 1, Je sape donc je suis
Retrouvez l'épisode 2, Le photographe Baudouin Mouanda
Au début je trouvais bizarre de mettre un com sur mon propre blog! Et puis après tout, ce n'est pas moi qui ait écrit cette chronique et en plus j'ai un avis! Alors le voici: J'ai beaucoup aimé ce livre qui m'a fait sourire jusqu'au oreilles maintes fois, même si je n'en ai compris toutes les références. J'ai aussi aimé l'écriture et les multiples digressions autant d'Alain M que de Maud K. Encore merci pour cette collaboration.
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